Blog: Le chez-soi comme communauté
En marchant dans les rues de Parc-Extension, je suis frappé par son bourdonnement : des enfants qui courent dans les ruelles, des voisin.e.s qui discutent (ou crient) par-dessus les clôtures, les parfums d’épices qui s’échappent des fenêtres ouvertes. Chaotique, bruyant, vivant. Magnifique. Pas la beauté des vies qu’on imagine parfaites, mais celle de la vraie vie : des liens, bons et mauvais, qui débordent jusque dans la rue. C’est ce que je vise : pas seulement des bâtiments, mais des foyers pour la vie elle-même.
La mission de Brique par Brique est simple, mais multiple : créer des espaces où les gens peuvent s’épanouir, et cultiver des communautés où les liens prennent vie. Le logement, à lui seul, ne suffit pas. Un bâtiment sans résident.e.s n’est qu’un assemblage de briques et de mortier, et des personnes sans logement finiront tôt ou tard par se disperser.
Ensemble, les individus et leurs foyers constituent le fondement de la création collective.
Donc oui, le logement… mais la réalité financière est brutale. Produire des logements abordables exige de l'ingéniosité: construire à faible coût mais avec qualité, sans dépendre du financement gouvernemental; rendre les projets financièrement viables tout en les gardant accessibles pour des personnes aux moyens limités… Tout un casse-tête.
L’immobilier est traité comme une marchandise, alors on essaie de fonctionner autrement, en tirant ce qu’on peut d’un système en miettes. Notre « profit » est social : des communautés stables, des résident.e.s connecté.e.s, des foyers où les gens se sentent vus et valorisés. Mais nos coûts sont financiers.. Un vrai de vrai casse-tête.
La gentrification accentue l’urgence. Des rues autrefois animées deviennent plus silencieuses à mesure que la hausse des loyers déplace les résident.e.s de longue date. Les espaces publics sont davantage surveillés; les espaces privés se fortifient. La vie ralentit, sous la prudence et la peur. Beaucoup quittent pour les banlieues éloignées, voire d’autres provinces, fragmentant des réseaux qui ont mis des années à se tisser. Un chez-soi, c’est bien plus qu’un toit - c’est la sécurité, la solidarité et la connexion. Notre travail aide les résident.e.s à rester ancré.e.s, même alors que les pressions s’intensifient.
La collaboration est essentielle. La moitié de nos relations s’étendent au-delà de Parc-Extension. Nous partageons du personnel, des espaces, des connaissances. Nous soutenons des organisations alliées, créant un réseau qui nous permet à tou.te.s d’accomplir bien plus que ce que nous pourrions faire seul.e.s. Le milieu communautaire est fragmenté et compétitif; le partage des ressources est rare. Mais construire du logement en silo est presque impossible. La collaboration rend l’impossible envisageable.
Notre centre culturel sur la rue Beaumont nous place à la jonction de celles et ceux qui peuvent soutenir les services et de celles et ceux qui en ont le plus besoin. Nous cultivons une communauté socialement diversifiée, fondée sur la solidarité et non sur la charité. En accueillant des étudiant.e.s, des artistes, des nouveaux arrivant.e.s et des résident.e.s de longue date, nous tissons des réseaux qui renforcent tout le monde.
Comme je le disais, construire du logement, c’est tellement plus que bâtir des immeubles. En cette Journée nationale de l’habitation, nous devons changer la conversation. Compter des unités, des pieds carrés ou des dollars ne suffit pas.
Nous devons nous demander : est-ce que nous bâtissons des communautés? Créons-nous des foyers où les gens se sentent entendu.e.s, inclus.e.s et utiles? Favorisons-nous des réseaux qui permettent aux résident.e.s de s’épanouir, même lorsque les quartiers se transforment?
C’est ce type de logement qui compte réellement. Pour nous, à Brique par Brique, bâtir des maisons, c’est bâtir des communautés, c’est bâtir la vie elle-même. C’est coûteux, complexe et épuisant - mais l’impact dépasse largement une seule rue ou une seule ville.
Le logement n’est pas seulement un abri; c’est un chez-soi, une communauté, une base pour la dignité. Et c’est un travail qui en vaut la peine.
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